Certains d'entre vous pourraient se demander pourquoi nous choisissons d'évoquer ce sujet. Pour d'autres, cela semblera évident.
Souvenez-vous du prétexte de l'OMS au fiasco de la fausse pandémie du H1N1.
L'OMS a dit: "c'est la faute d'internet! ".
En juillet 2010, à l'initiative de la Belgique, une réunion de "debrieffing" avait lieu au niveau européen, réunion à laquelle participaient tous les responsables de cette gigantesque arnaque du H1N1 (OMS, agence européenne du médicament) et à laquelle avait aussi été conviés des représentants de Facebook... Car en effet, dans la prévision de leur prochaine pandémie (tant attendue), il va leur falloir soigner la propagande et même, la professionnaliser davantage ce qui impliquera que la communication officielle "suinte" bien davantage au travers de la communauté facebook.
Internet est donc un énorme enjeu. Un énorme enjeu démocratique mais aussi économique car les industriels ont très bien compris l'impact de ce média indépendant sur leur chiffre d'affaires mais aussi sur leur réputation.
Internet est cependant particulièrement menacé. Menacé à la hauteur de l'enjeu économique qu'il représente pour toute une série de rapaces!
C'est cela tout l'enjeu du traité international ACTA. Retenez bien ce nom car très (trop) peu de gens en ont connaissance.... Ce traité scélérat continue de poursuivre sa route, dans l'ombre et en dehors de tout contrôle démocratique.
Bien sûr, il y a toujours des prétextes. L'histoire des dictatures n'existerait pas sans la longue litanie des multiples prétextes qu'elles ont utilisés pour asservir les populations mais toujours petit à petit.
Voilà pourquoi il est absolument crucial, à chaque mesure liberticide d'analyser le prétexte au nom duquel cette mesure doit soi-disant être adoptée et donc "tolérée" par le grand public.
Ici, dans le cas d'ACTA, le prétexte est la protection des droits d'auteurs et la protection contre les contrefaçons.
L'histoire de ce traité commecial, toujours en cours de négociation remonte à plusieurs années. Selon Wikipedia, depuis 2007, les négociations relatives à ce traité se déroulent dans la plus grande opacité. En mai 2008, Wikileaks révèle à la presse le dossier et ce qui est en train de se tramer.
Ce traité est discuté et négocié par des états comme les USA, le Japon et des structures comme la très antidémocratique Commission européenne. Au total, ce sont 39 états qui sont "autour de la table".
L'opacité est cependant telle que les eurodéputés qui voulaient des réponses et des éclaircissements n'avaient pour autre choix que de se renvoyer l'un l'autre à... la page Wikipedia du traité ACTA! Cette situation est, ceci dit au passage, une violation pure et simple du droit de l'Union européenne comme rappelé par l'eurodéputée Eva Lichtenberger qui a ainsi rappelé à la Commission européenne que "« l'accord-cadre du 26 mai 2005 sur les relations entre le Parlement européen et la Commission prévoit que la Commission "informe le Parlement clairement et sans délai, tant pendant la phase de préparation des accords que pendant le déroulement et la conclusion des négociations internationales"».
Le parlement a même dû menacer la Commission d'aller devant la Cour de justice européenne parce qu'elle ne respectait par le traité de Lisbonne imposant d'informer le parlement, à tous les stades de la négociation.
Ce qui est toutefois assez alarmant c'est qu'en décembre 2008, "seuls" 309 parlementaires européens sur 541 (232 ayant voté contre!) ont adopté la résolution invitant à rendre les documents préparatoires du traité publics!
En fait comme rappelé par Wikipedia, le traité ACTA établirait un nouveau cadre juridique, créant son propre organisme de gouvernance indépendant d'institutions internationales déjà existantes comme l'OMPI (organisation mondiale de la propriété intelectuelle) ou l'ONU.
Dans un article publié sur le site du Point ("Acta, un traité qui menace Internet?" ), on peut lire les propos éclairants du négociateur de la Commission européenne:
"Nous avons essayé de discuter à l'OMC, à l'OMPI et même à l'Organisation mondiale des douanes (OMD), mais certains membres ne voulaient pas entendre parler de ces questions. Après plusieurs années d'essais infructueux, il nous restait la solution de réunir les États volontaires pour créer l'ACTA".
Pour Jérémie Zimmermann (La Quadrature du Net), cette méthode du "forum shifting" consiste à "passer d'une arène à une autre jusqu'à ce que l'on réussisse à faire valider ce qu'on veut". Et de préciser que, dans le cas de l'ACTA, l'Union européenne et ses partenaires auraient "contourné les instances démocratiques et l'opinion publique" pour "créer un forum ad hoc, sans transparence, avec la volonté d'échapper au processus législatif."
Ce groupe de pays négociateurs espère entraîner un maximum de pays émergents dans son sillage.
Les conséquences d'un tel traité seraient profondes car il est question d'un filtrage du net, sans l'avis du juge (!). Un filtrage qui reposerait sur la responsabilité des fournisseurs d'accès internet (FAI) qui seraient ainsi épargnés de poursuites pénales s'ils privent d'accès internet ou d'accès à certains sites "contrevenants". En intimidant ainsi les FAI, l'ACTA joue sur la "peur du juge" pour faire collaborer ces intermédiaires en dehors de tout cadre institutionnel et judiciaire.
Même des logiciels libres, utiles à l'écoute et la réception de plusieurs données, pourraient devenir interdits...
Wikipedia nous en apprend davantage sur la "ferveur pénale" d'un tel traité:
"S'il était adopté, le traité établirait une coalition internationale destinée à s'opposer aux violations du droit d'auteur, imposant une application stricte des lois sur le droit de la propriété intellectuelle dans différents pays. L'entente permettrait aux douaniers de fouiller des portables, des lecteurs MP3 et des téléphones cellulaires à la recherche de produits qui violent le droit d'auteur."
Les pays négociateurs se sont d'ores et déjà accordés, selon Wikipedia, sur l'application d'amendes et de peines de prison "suffisamment élevées" contre le "piratage à une échelle commerciale", "y compris lorsque ce dernier est réalisé sans but lucratif."
Alors que les plus grands criminels sont souvent à l'air libre et non derrière les barreaux, voilà un traité qui prévoit des peines de prison pour le partage altruiste de logiciels utiles. Une telle disproportion, un tel contraste peut très difficilement s'expliquer sans motivation non avouée (inavouable).
A ce train là, il faut bien comprendre que pourront également être concernés tous les fidèles relais par les sites et blogs d'articles de presse sur divers sujets et cela bien sûr au nom des "droits d'auteurs" (des journalistes). Pourtant, dans les faits, tout cet effet "amplificateur" qui avait tant gêné les plans vaccinaux mondiaux de l'OMS en matière H1N1 pourrait bien être compromis et la liberté d'expression avec. Le simple quidam qui surfera ne finira donc plus qu'à trouver une "photo" très peu fidèle de l'opinion publique sur internet, tout simplement parce que tous les citoyens n'ont pas le temps de rédiger leurs propres articles et de faire leur propre synthèse.
On le voit, le sujet de l'ACTA est très sensible. Et à la lumière des raisons explicitées ci-dessus, on comprend pourquoi.
Pour donner l'illusion de la "transparence" ou faire croire qu'il n'y a rien à cacher et après plusieurs fuites successives en 2008, 2009 et 2010, les parties ont consenti à publier une ébauche officielle (20 avril 2010) ainsi qu' une version retravaillée (octobre 2010)
Tout cela fait diablement penser aux méthodes utilisées par les protagonistes de la mascarade du H1N1. En effet, à l'époque, le gouvernement belge prétendait aussi qu'il n'y avait rien à cacher et donnait "en miette" un texte caviardé du contrat qui ne correspondait seulement qu'à 4% du texte réel. Sans parler de l'OMS qui refusait pendant tout un temps de publier le nom des experts de son fameux comité secret puis qui, après l'avoir fait a commandé une enquête ayant fini par la blanchir de tout conflit d'intérêts ce qui fut sans conteste la meilleure blague de l'année.
L'aspect pénal des dispositions fait lui aussi penser à cette saga du H1N1 si on veut bien se souvenir que la fameuse loi d'exception ("loi de pouvoirs spéciaux") prévoyait également des sanctions pénales, chose pour le moins étrange quand il s'agit vraiment de protéger la santé de tous.
La conclusion de cet article est la même que celle que l'on pourrait faire pour un article portant sur la démocratie en général: la neutralité du net appelle forcément une vigilance de tous les instants.
Sans vigilance citoyenne structurée et organisée en comités dédiés plus spécifiquement à cette problématique, il est impossible d'opposer une résistance efficace et lucide.
C'est la raison pour laquelle différents comités et structures ont déjà, fort utilement, pris position, contre ce genre de projet de traité liberticide. Citons par exemple Reporters Sans Frontières qui a ainsi dénoncé "une menace internationale pour la liberté d'expression sur Internet", le collectif français "La Quadrature du Net" qui réalise aussi un formidable travail d'information avec ses divers dossiers publiés sur son site.
En Belgique, il existe également une structure citoyenne, appelée Nurpa (Association de protection des droits des internautes) qui a déjà entamé diverses démarches, en faisant notamment signer à plusieurs candidats à l'élection du 13 juin 2010, issus divers partis politiques, "le pacte de l'internet libre". Ils ont notamment pu être entendus par une Commission du Sénat là où la proposition d'une députée fédérale de nous auditionner en matière d'indépendance de l'expertise lui avait été refusée...
Sources: Wikipedia, Le Point, La Quadrature du Net, Numerama
En lien avec cet article, voir aussi l'article suivant:
« H1N1 et autres « pandémies » : faut-il craindre pour notre liberté d’expression ? »