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20 octobre 2009 2 20 /10 /octobre /2009 00:34

Mis en ligne le 19/10/2009


La grippe H1N1 n'est pas plus grave que celles qui l'ont précédée. Pourtant, de plus en plus nombreux sont les patients inquiets. Une opinion du Dr Michel Hallez, médecin de famille.


A ce jour, nous, médecins de famille, sommes confrontés à de nombreuses questions angoissantes d’une grande majorité de nos patients. Chaque jour, nous passons un peu plus de temps lors de nos consultations pour informer nos patients et surtout les rassurer. Jamais, en plus de trente ans de pratique et autant d’années à traiter des grippes, je n’ai eu à subir à un tel déferlement de questions. Alors que cette grippe-ci n’est pas plus grave que celles qui l’ont précédée. Pourquoi, faut-il se demander ? Parce que jamais auparavant des pouvoirs publics, relayés par les médias, n’ont insufflé autant d’angoisses dans la population, par leurs prises de position et leurs déclarations. Quand, il y a quelques années, le risque qu’un mutant viral de la grippe aviaire s’est présenté, les pouvoirs publics ont concocté des plans catastrophes sur base de simples hypothèses scientifiques.


En avril 2009, un nouveau virus grippal est apparu quelque part entre le Mexique et les Etats-Unis. L’impression d’un nombre élevé de décès a rapidement attiré l’attention des grands organismes internationaux. Mais on n’avait pas pris en compte le nombre très élevé de malades non recensés. Encore plus rapidement les pouvoirs publics se sont alarmés et en quelques semaines ont ressorti de leurs tiroirs les plans catastrophes élaborés quelques années plus tôt. Ces plans, notamment dans notre pays, ont tout de suite engendré de nombreuses réactions de la part des médecins et de leurs sociétés scientifiques.


S’il est plausible d’imaginer que cette épidémie à venir risque de provoquer un dépassement des structures habituelles de première ligne médicale, fallait-il mettre sur pied de guerre communes et corps médical, et, par ce biais, angoisser la population (notamment par l’énumération des décès, alors qu’on sait que chaque année meurent d’infections hivernales des centaines de personnes dans notre pays, dans l’anonymat le plus complet) ?


Bref, les médecins ont tellement réagi face à l’impraticabilité de ces mesures que ce plan catastrophe a subi depuis sa présentation en juillet des modifications quasi hebdomadaires, au point de donner le tournis dans un premier temps aux structures médicales et communales, et ensuite de provoquer un sentiment de rejet face à ce qui apparaissait comme un réel amateurisme ! Logique, tous ces plans ont été élaborés dans des cénacles d’experts complètement déconnectés de la réalité quotidienne des soins de première ligne habituellement concernés par cette maladie. Il serait impossible en quelques lignes de décrire ici tous les retournements en matière de prise en charge du patient par les médecins de famille, par les communes, par des centres régionaux de dispensation de soins, etc. Heureusement, aujourd’hui, on a reconnu, après beaucoup de vicissitudes, l’importance et l’expérience de la première ligne de soins dans la prise en charge de ce type de pathologie, même en cas d’épidémie importante. L’existence récente es cercles de médecins généralistes a grandement facilité la prise de décisions pour unifier, par région, les stratégies à appliquer. Deux exemples.


Le premier, tout à fait édifiant, est celui des médicaments antiviraux. Ils furent présentés, dès la menace de grippe aviaire il y a quelques années et dès la menace d’une nouvelle pandémie H1N1, comme la solution face aux virus influenza de grippe. Ces médicaments existent depuis plusieurs années. Ils n’ont jamais été remboursés chez nous. Et ont rarement été prescrits. Parce qu’on rembourse habituellement des médicaments qui ont fait preuve d’efficacité. Ces antiviraux ont un seul effet positif prouvé : donnés dans les 48 premières heures de la maladie, ils en raccourcissent la durée d’une journée; aucune étude de bonne qualité n’a prouvé qu’ils pouvaient réduire le nombre et la gravité des complications de la grippe ni la mortalité. Par contre, ils ont de nombreux effets secondaires, particulièrement chez les enfants (20-30% ). Mais il est vrai que les stocks effectués pour la grippe aviaire sont là et qu’il faut les utiliser . Tout médecin qui s’est un tant soit peu renseigné sur ces médicaments hésite à les prescrire aujourd’hui.


L’autre exemple est celui du vaccin. Promis à grand renfort de publicité depuis juillet, il arrivera fin octobre, plus vraisemblablement de novembre à janvier. C’est-à-dire peut-être après que l’épidémie se soit déclarée. Logique, on ne peut pas expérimenter un médicament (c’en est un !) et le produire en quelques mois. Première conséquence : nous sommes devant un vaccin dont l’innocuité sera inconnue. Logiquement, les effets secondaires ne seront pas plus nombreux que pour le vaccin antigrippal saisonnier, puisqu’il est produit de la même façon. Cependant, nous, médecins, devrons être très vigilants. Ensuite, ce vaccin arrivera dans les pharmacies par petites quantités progressives. Le ministère de la santé veut qu’il soit gratuit. Il est donc obligé de déterminer des groupes de patients prioritaires pour le recevoir. De source scientifique, nous savons que les populations les plus à risque de faire la grippe H1N1 et ses complications ne sont pas les mêmes que pour la grippe H2N3 habituelle. Il faudra donc convaincre de nouveaux groupes à se faire vacciner et résister à la pression de ceux qui étaient habituellement vaccinés avec remboursement auparavant. Cette situation ne sera pas facile à gérer.


Finalement, nous retiendrons un effet positif de cette campagne d’information, c’est la nécessité, en cas de maladie contagieuse (toutes les infections respiratoires courantes et toutes les infections intestinales), de réaliser les gestes qui respectent et protègent l’autre : éviter les bisous et les embrassades quand on est malade, éviter de disséminer ses virus lors d’éternuements et de toux, se laver souvent les mains au savon et à l’eau courante sous le robinet ! Simple, mais pas évident !


Il nous paraissait que toutes ces réflexions puissent être diffusées à un public le plus large possible pour rétablir une certaine vérité, pour regretter que les autorités n’aient pas utilisé, dès le départ, un langage clair et apaisant auprès de la population. Il n’est pas encore trop tard, pour nos autorités, politiques et scientifiques, d’organiser une véritable information, par exemple lors d’un débat télévisé diffusé simultanément sur nos grandes chaînes : relativiser la gravité de cette maladie, la valeur des médicaments antiviraux proposés et bien expliquer sa stratégie en matière de prévention (vaccination).


Source: La Libre

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