Serge Forgues
Le Journal de Montréal,
23/05/2011
Pour avoir brusqué un enfant afin de lui administrer le vaccin contre la grippe A (H1N1), une infirmière de Chibougamau vient de se faire imposer une radiation temporaire de quatre mois. Devant le Conseil de discipline de l'Ordre des infirmières du Québec, Marjolaine D. Pearson a reconnu avoir tiré par les bras un enfant, en cris et en larmes, qui refusait de se faire vacciner. Elle a ensuite amené l'enfant derrière un paravent et l'a assis sur une chaise, pour ensuite lui administrer la redoutée piqûre, le 5 novembre 2009. Ayant 32 ans d'expérience, l'infirmière s'est alors exécutée sans même s'adresser à la mère de l'enfant, pourtant présente sur les lieux.
Un geste devant témoins
Des gens qui ont assisté à la scène, notamment des infirmières, ont alors rapporté la situation au supérieur présent sur place. L'infirmière fautive a été relevée de ses fonctions à la clinique de vaccination dès le lendemain de l'événement. Sous le choc, elle a ensuite profité d'un congé de maladie de six mois, se disant incapable de reprendre le travail.
Disant regretter son geste, Mme Pearson a affirmé au Conseil avoir agi ainsi par crainte que l'enfant parte sans avoir obtenu son vaccin.
Responsable de la mise en place de la clinique de vaccination dans la ville de Chibougamau, elle a ajouté qu'elle s'en serait voulue si l'enfant avait contracté la grippe A (H1N1).
Sous pression
L'infirmière a également fait valoir qu'elle était sous pression au moment du geste reproché, car tout le monde parlait à ce moment de la grippe A (H1N1) et qu'elle voulait que la vaccination se déroule le plus rapidement et le mieux possible.
Il semble toutefois qu'avant cet événement, cette dernière avait déjà la réputation, auprès de son supérieur immédiat et certaines de ses collègues, d'être «bête avec certains patients».
Exacerber la peur
Dans sa décision, le Conseil de discipline mentionne que le geste posé par Mme Pearson «va à l'encontre de l'essence même de la profession d'infirmière» et que le comportement en question est «inacceptable».
On ajoute qu'au lieu de «prendre les moyens nécessaires pour apaiser la crainte de l'enfant», l'infirmière «l'a sûrement exacerbée en agissant comme elle l'a fait.»
Concernant la durée de la sanction, le Conseil dit avoir tenu compte du fait que les gestes reprochés ont été posés «dans un contexte spécial qui ne se reproduira possiblement pas au cours des quelques années de carrière qu'il reste à l'intimée», celle-ci comptant tirer sa révérence dans trois ans. La crainte d'être frappé par la pandémie de grippe A (H1N1) avait convaincu 55 % des Québécois de se faire vacciner en 2009.
Lors du blitz de vaccination, la région du Nord-du-Québec avait reçu ses doses de vaccins en priorité, car les populations autochtones avaient été affectées lors de la première vague de grippe. Selon l'Institut national de la santé publique du Québec, 108 personnes ont perdu la vie et 3 064 autres Québécois ont été hospitalisés entre le mois d'avril 2009 et le mois de mai 2010 en raison de la grippe A (H1N1).
Source: Canoé.ca
Cette sanction est méritée. On remarquera toutefois que celle-ci n’est que temporaire là où les funestes conséquences de la vaccination peuvent, elles, parfois peser, toute une vie durant, sur la santé des personnes vaccinées.
Mais surtout, ce genre de sanction renvoie finalement toute la société à ses propres contradictions : en effet, que dire de tous ces professionnels de la santé, médecins et infirmières qui vaccinent quotidiennement, de force, des jeunes enfants innocents, incapables de donner leur avis et dont les parents font aveuglément confiance ?
Que dire aussi du cas des vaccins rendus obligatoires par une loi que des soignants appliquent par pur principe, le plus souvent sans réfléchir ? Seront-ils un jour eux aussi sanctionnés ? En termes de cohérence, il y a donc, on le voit, beaucoup de questions à se poser.